Agriculteurs en conflit avec Agrial : récoltes de graminées non payées (Orne Hebdo)

Trois agriculteurs (deux en Sarthe et un en Indre-et-Loire) réclament l’intégralité de la somme qui leur était dû pour leur récolte de 2019.  Jugée non conforme aux règles sanitaires, la coopérative Agrial a refusé de les payer.

Quand Julien Juglet a transmis sa récolte de graminées, il était loin de se douter qu’elle allait faire polémique.
Ce jeune agriculteur à Champfleur cultive des dactyles et des fétuques, mais en 2019, ses semences sont jugées non conformes aux réglementations sanitaires. En cause, un taux de vulpin trop élevé.

Refus de l’un, puis de l’autre

Ces plantes invasives sont parmi les plus nuisibles de la culture céréalière et leur présence dans la production ne doit pas dépasser 0,3 %. Or des analyses confirment la présence de vulpin de l’ordre de 1,4 % pour les fétuques et 2,7 % pour les dactyles.

 Ils m’ont dit que ma récolte ne valait rien », raconte Julien Juglet.

Un dialogue s’entame avec Agrial, qui gère l’entreprise de triage qui a confirmé les mauvaises analyses. La coopérative finit par proposer 50 % de la somme initiale qui est aux alentours des 53 000 €. Mais l’agriculteur refuse.

Fin mars, une commission est mise en place pour tenter de trouver une solution.

À l’issue de celle-ci, il est demandé à Agrial de verser 66 % de la somme à Julien Juglet. Le Champflorain accepte le compromis mais cette fois, c’est Agrial qui refuse. Depuis, la situation est bloquée et pourrait se résoudre devant les tribunaux.

Un changement de politique

Julien Juglet n’est pas le seul concerné. Au total, ils sont une soixantaine d’agriculteurs à entamer le dialogue. Si la plupart ont accepté le compromis, trois demandent à recevoir la totalité de la somme initiale qui leur était due.

Laurent Veau est l’un d’eux. Agriculteur à Cherré (Sarthe), il affirme n’avoir :

jamais vu de conflits de cet ordre-là ».

Leurs récoltes non conformes n’ont jamais posé de problème par le passé. L’entreprise de triage Benoist Sem (aujourd’hui Sémara) les acceptait sans broncher mais ce n’est plus le cas. Aujourd’hui filiale d’Agrial, le groupe a tenu à remettre de l’ordre dans les pratiques.

 Il y a eu beaucoup de dérives par le passé. Des pratiques étaient non conformes et on les a réglées », précise Arnaud Degoulet, le président d’Agrial.

Il affirme que l’entreprise est « repartie sur de bonnes bases ».

Les techniciens donnent le feu vert

Le couac pourrait venir des techniciens qui analysent les récoltes. Après leur expertise, ils décident si la récolte peut être lancée. Toutes ont été validées. « Ce sont des nouveaux techniciens qui n’ont pas encore les compétences », explique Laurent Miché du syndicat de la Fnams (Fédération nationale des agriculteurs multiplicateurs de semences). Contacté, un ex-technicien du groupe affirme que de « nombreux dysfonctionnements existent ».

Des productions évaporées ?

Après avoir envoyé leur récolte, les agriculteurs cherchent maintenant à les récupérer, en attendant de trouver une solution… Mais ils n’ont pas de nouvelles. « J’ai essayé de les appeler de nombreuses fois mais je n’ai jamais eu de réponses », déplore Laurent Veau.

Julien Juglet navigue entre les contradictions. « Une technicienne de l’entreprise m’a dit que mes lots avaient été triés mais on m’a aussi annoncé que cela avait été détruit. »

L’agriculteur de Champfleur, dont « l’exploitation est en danger sans le règlement total de la somme », compte bien se battre jusqu’au bout.

Déjà passée en commission en mars 2020, l’affaire pourrait rapidement atterrir devant les tribunaux si aucune solution à l’amiable n’est trouvée.

Source : L’Orne Hebdo sur https://actu.fr/pays-de-la-loire/champfleur_72056/sarthe-pas-payes-pour-leur-recolte-non-conforme-aux-regles-des-agriculteurs-rentrent-en-conflit-avec-la-cooperative-agrial_36153627.html