25 Oct 2019 FRANCE STRATÉGIE : UNE VISION PUNITIVE ET DANGEREUSE DE LA PAC !
Dans son rapport publié le mercredi 23 octobre et intitulé « Faire de la PAC un levier de la transition écologique », France Stratégie (institution rattachée au Premier ministre et décidément toujours aussi mal inspirée !) propose une déclinaison française de la PAC basée sur la stricte application du principe pollueur-payeur.
LA CAROTTE ET LE BÂTON !
Le but de France Stratégie serait de forcer la conversion à l’agriculture biologique ou à l’agroécologie par la contrainte d’une taxation :
- sur les engrais (20 à 70 %),
- des produits phytopharmaceutiques (15 à 100 %),
- des antibiotiques (20 à 70 %),
- de l’émission de gaz à effet de serre par l’agriculture (30 à 56 €/t de GES).
Cela donnerait au ministère de l’Agriculture un budget supplémentaire de 4 à 11 milliards, prélevé sur les agriculteurs les moins vertueux (malus) et affecté aux agriculteurs les plus vertueux (bonus).
Seraient ainsi soutenus par le produit de la taxation :
- le maintien des prairies permanentes (200 à 457 €/ha),
- la diversification des cultures (130 à 303 €/ha),
- les SIE (200 €/ha),
- les trames vertes et bleues ainsi que les zones Natura 2000,
- des contrats dits d’innovation agro-écologique (soutenant la conversion en AB ou en HVE).
DES AIDES PAC QUASIMENT DIVISÉES PAR 2 !
Le 1er pilier (aides découplées à l’hectare) laisserait la place à un paiement à l’équivalent temps plein (ETP) annuel ou UTA. Au lieu d’un paiement moyen de 135 €/ha, cela donnerait un paiement de 8 000 €/ETP/an !
La chute des aides PAC serait ainsi vertigineuse :
– 46% d’aides pour un céréalier !
– 40% d’aides pour un éleveur laitier dit intensif !
FRANCE STRATÉGIE NE PROPOSE AUCUNE RÉGULATION DES MARCHÉS !
La mise en place de ce système de bonus-malus serait envisagée de façon progressive. Elle ne nécessiterait aucune adaptation préalable des fondements européens de la PAC.
Concrètement, pendant que les agriculteurs français se retrouveraient menés au bâton et à la carotte, les agriculteurs des autres États membres pourraient bénéficier d’un régime plus clément. Il viendrait de fait aggraver les distorsions de concurrence intra-communautaires. La politique agricole COMMUNE ne serait ainsi qu’un lointain souvenir !
Et bien sûr, le rapport ne propose rien en termes de régulation qui permettrait d’améliorer les revenus des agriculteurs. Ni même une quelconque stratégie sur les protéines végétales et un rééquilibrage des productions, qui aurait pourtant un effet positif majeur sur l’environnement. Le cadre reste libéral et totalement ouvert à la mondialisation.
La Coordination Rurale et France Grandes Cultures enjoignent le Gouvernement de ne surtout pas suivre des recommandations aussi dangereuses. Le risque est simple : littéralement saborder ce qu’il reste encore aujourd’hui de l’agriculture française. Il est d’ailleurs pour le moins surprenant qu’un think tank officiel et financé par l’État, dénommé qui plus est « France Stratégie », omette totalement de s’intéresser à l’aspect productif de l’agriculture française et européenne dont la fonction est éminemment stratégique. Il ne s’agit pas moins que d’assurer la sécurité alimentaire de la population…